Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja
Nasr Eddin, c'est peut-être l'idiot du village...
... mais c'est sûr, il n'est pas fou!
Voici un personnage connu dans tout le Moyen-Orient : Nasr Eddin Hodja, héros légendaire dans le monde musulman, il est l'incarnation même de l'irrévérence. De méchantes langues chuchotent qu’il n'a jamais existé, d’autres revendiquent bec et ongles sa nationalité. On ne sait s’il naquit réellement au début du XIIIe siècle en constatant qu’il tire sur tout ce qui bouge deux siècles plus tard, au mépris de la chronologie. Le plus sage est de le croire albanais, grec, russe, serbo-croate, caucasien, chinois, indou, turc, iranien, ouzbèke, perse et arabe, et de s’accorder que l’Idiotie idéale ignore superbement le temps. Le présent recueil, patiemment assemblé par Jean-Louis Maunoury, nous restitue un Nasr Eddin (en arabe : soutien de la religion) Hodja (maître d'école coranique) conforme aux sources les plus anciennes, accommodé avec les seules épices du cru. Soit plus de deux cents histoires hautement réjouissantes à déguster dans leur jus qui tendent à faire surgir la vérité de l’absurde. Les poètes soufis de l'âge classique feront des aventures du « divin » Hodja autant de sujets de méditation philosophique, histoire de se libérer du sérieux qui est la plus sûre entrave à la vraie liberté de l'esprit.
Mais foin de discours voici une histoire ou deux de Nasr Eddin Hodja :
UN REMÈDE POUR L'INTELLIGENCE
Il y avait dans le village voisin un garçon bête, mais bête au point d’avoir du mal à reconnaître ses parents, lesquels décidèrent, un jour, de consulter le Hodja :
— Nasr Eddin, sais-tu le moyen de faire revenir un peu d’intelligence à notre fils, juste assez pour qu’il puisse garder les oies sans nous en perche une par jour ?
— Vous ne pouviez mieux tomber, répond le Hodja : je connais la recette des pilules miraculeuses. Revenez demain.
Une fois seul, Nasr Eddin ramasse des crottes de bique et les roule dans le sucre une par une.
Le lendemain, les parents sont de retour, accompagnés de leur idiot, auquel Nasr Eddin tend deux « pilules » :
— Tiens, mon fils, goûte-moi un peu ça, qui va te faire marcher la cervelle.
Le garçon les prend et les met dans sa bouche :
— Mais c’est de la merde ! s’écrie-t-il en les recrachant aussitôt.
— Vous voyez, triomphe Nasr Eddin en se tournant vers les parents, ça vient, ça vient !
LES RICHES ET LES PAUVRES
À une sécheresse de plusieurs mois avait succédé la famine. Mais tout le monde ne mourait pas de faim pour autant : les riches avaient pris soin de faire d’amples réserves de blé, d’huile, de légumes secs et de viande séchée.
Khadidja dit alors à son mari :
— Nasr Eddin, toute la ville te tient pour un homme de poids. Ne reste pas les bras croisés ; va sur la place, rassemble tout le monde, et tente de convaincre les riches de donner à manger aux pauvres.
Nasr Eddin trouve pour une fois que sa femme a raison. Il fait comme elle dit et, deux heures après, rentre, la mine réjouie.
— Ma femme, rendons grâce à Allah le Miséricordieux !
— Ah ! Tu as donc réussi ?
— Ce n’était pas une mission facile. À moitié.
— Comment cela, à moitié ?
— Oui : j’ai réussi à convaincre les pauvres.
Et vous, vous êtes convaincu? Presque, alors pour en savoir un peu plus sur Nasr Eddin Hodja
En voici donc plus de cinq cent, j'y ai ajouté lettrines et culs de lampe... Bien du bonheur...
Et comme dirait Vialatte, c'est ainsi qu'Allah est grand!
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